mercredi 9 septembre 2015

The Set-Up (nous avons gagné ce soir)

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"... And I'm just one punch away."

Le regain d'intérêt, constaté depuis le début de ce siècle, pour le film de boxe nous incite à (re)voir les œuvres précurseures1 des années 1930-40, références avouées de la plupart des cinéastes modernes impliqués dans ce mouvement de réactivation. Premier long métrage produit par Richard Goldstone pour la RKOThe Set-Up possède la particularité d'être librement adapté d'un long poème (en six parties) écrit en 1928 par l'ancien journaliste new-yorkais 2. Celle également d'avoir été l'une des premières fictions en temps réel de l'histoire du cinéma. Assez différent du Champion de Mark Robson avec , distribué une semaine plus tard, le film réalisé par 3 nous propose un bref mais saisissant témoignage sur les coulisses de combats de seconde zone, sur les aspects obscurs du noble art.
A trente-cinq ans, Bill 'Stoker' Thomson est désormais un vétéran du ring n'ayant jamais connu son heure de gloire. Lassée de cette existence itinérante et médiocre, marquée par les récentes défaites par K.O. de son époux, Julie tente de le persuader de raccrocher les gants. Convaincu de sortir victorieux de son combat du soir organisé contre le jeune 'Tiger' Nelson, Bill conserve l'espoir de pouvoir améliorer un peu leur quotidien, voire même réaliser un des projets de reconversion professionnelle qu'il envisage depuis quelques temps. Sûr d'un nouveau revers, son manager Tiny a lui accepté cinquante dollars du bras droit de 'Little Boy', promoteur de la carrière de 'Tiger' Nelson, pour que 'Stoker' se couche au troisième round... sans en informer celui-ci. Munie du billet laissé pour elle par son mari, Julie décide finalement de ne pas assister à la rencontre et d'errer dans les rues animées de Paradise City.
Respectant la règle des trois unités du théâtre classique, The Set-Up s'apparente à une tragédie de la fatalité en trois actes. La majeure partie4 du premier script signé par 5 se déroule dans les vestiaires où se préparent la moitié des boxeurs s'affrontant ce mercredi. Lieu où se croisent quelques instants des individus dissemblables, adversaires potentiels mais subjectivement interreliés. Espace confiné où s'entrechoquent l'angoisse du premier combat, la certitude d'un parcours déjà planifié, les (dés)illusions connues/nourries de pouvoir enfin, même tardivement, inverser la trajectoire suivie jusque-là.  porte également une attention particulière au public, à leurs motivations et attentes singulières, souvent bien éloignées de considérations sportives, techniques ou esthétiques. Associé pour cette unique occasion au directeur de la photographie Milton R. Krasner6, le cinéaste accomplit d'ailleurs ici un remarquable travail de réalisation ; il posait aussi les bases de tournage d'un combat de boxe (utilisées notamment par Martin Scorsese pour Raging Bull). L'interprétation de 7, ex-champion universitaire de boxe, celle plus effacée d'8, sans inapproprié artifice de séduction, et le solide casting de soutien réuni constituent un des nombreux atouts du film.
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1. The Champ (1931), Kid Galahad (1937), Gentleman Jim (1942), Body and Soul (1947).
2. auteur la même année d'un autre poème, "Wild Party", adapté en 1975 par James Ivory, co-scénariste de  produit et réalisé par Howard Hughes.
3. le neuvième et dernier de son engagement constractuel à l'égard du studio racheté l'année précédente par Howard Hugues.
4. le combat Thomson vs Nelson dure une vingtaine de minutes.
5. co-scénariste notamment de Stromboli (1950) de Roberto Rossellini et de The Tall Target (1951) d'.
6. primé au 4e Festival de Cannes, première des deux seules récompenses reçues, avec l'"Oscar" (catégorie couleur) 1955, au cours de sa carrière par ce très talentueux cinématographe.
7. Remarqué dans Crossfire (1947).  n'avait pu obtenir l'engagement d'un Afro-américain (groupe auquel appartient le personnage de Pansy Jones dans le poème).
8. prêtée par la MGMJoan Blondell, avec laquelle Totter tournera dans The Blue Veil, été pressentie pour le rôle de Julie Thomson.





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