"- Chaque client apporte une ou deux bouteilles.
- Et nous les gardons des années."

Satsuki,
employée à la clinique Irokawa, voit arriver un matin une cliente
désirant se faire poser un piercing à travers les mamelons. La jeune
femme en question vit sous la domination d'un homme aisé qui, dans une
intimité consentante, l'enchaîne et la retient captive dans une cage.
L'individu nommé Gondo, expéditeur chaque jour d'un bouquet de
roses rouges à l'infirmière, convie finalement celle-ci à passer une
soirée ensemble. Dans son luxueux véhicule, il lui offre des chocolats à
la liqueur dont il a mélangé le contenu avec un autre liquide. Sur la
route, l'invitée ressent un urgent besoin d'uriner. Elle est bientôt
rejointe dans les toilettes publiques où elle s'est rendue et
brutalement violée par son amoureux présumé.

Réalisé par Shôgorô Nishimura, l'un des plus prolifiques collaborateurs de la Nikkatsu
et pionnier au sein du studio du Roman poruno(1), Chikubi ni piasu o shita onna
investit la veine S&M inaugurée en 1974 après le recrutement de l'actrice Naomi Tani
. Il sort d'ailleurs la même année que le Nawa to chibusa
de Masaru Konuma (avec Nami Matsukawa qui tient ici l'un des rôles secondaires), appartenant lui ouvertement à la tendance kinbaku (bondage) du sous-genre. Si une "filiation" existe entre le scénario du film et les écrits du marquis de Sade
, en particulier le premier et plus emblématiques d'entre eux(2),
elle doit davantage être trouvée dans le caractère subversif du récit
que dans sa "philosophie" anti-rousseauiste. Ce bref film, dont
l'intrigue mêle cruauté, soumission(3) et aliénation, se situe plus sûrement dans le sillon d'Histoire d'O
, adaptation du roman(4) paru en 1954 de Dominique Aury
par Just Jaeckin
. A l'exception de l'esthétique de certaines scènes, Chikubi ni piasu o shita onna
ne peut pas être considéré comme l'un des "grands crus" de Nishimura.









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1. voir introduction à la critique de Jorô seme jigoku
. Il est aussi l'initiateur de la série de films tirés des ouvrages d'Oniroku Dan
.


2. "Justine ou les Malheurs de la vertu" à propos duquel son auteur
écrivait en 1791 à son avocat : "On imprime actuellement un roman de
moi, mais trop immoral pour être envoyé à un homme aussi pieux, aussi
décent que vous. J'avais besoin d'argent, mon éditeur me le demandait
bien poivré, et je lui ai fait capable d'empester le diable... Brûlez-le
et ne le lisez point s'il tombe entre vos mains : je le renie."
3. à moins qu'il ne s'agisse, au choix, de dressage ou de domestication utilisant, au passage, l'urophilie.
4. rebaptisé par un journaliste "Attache-moi ou L'insoutenable liberté du corps".