"Toi aussi, tu te tires !"
Sélectionné à la dernière minute par les organisateurs de la 57e édition de la Berlinale, Tuya de hun shi repartait dix jours plus tard de la capitale allemande avec l'"Ours d'or". Le charme intimiste et social du troisième film du cinéaste chinois Wang Quan'an avait opéré et emporté l'adhésion du jury présidé par Paul Schrader malgré la sérieuse concurrence de productions venues d'autres horizons (Brésil, Israël, Autriche, Royaume-Uni, France ou Tchéco-slovaquie notamment). Les qualités de simplicité et d'authenticité du scénario co-signé par Lu Wei, adaptateur de Ba wang bie ji et auteur de Huozhe, la beauté rustique des paysages de Mongolie et de Yu Nan peuvent expliquer ce choix inattendu et néanmoins justifié.
Dans une plaine aride de Mongolie intérieure, Tuya élève presque seule quelques dizaines d'agneaux. Bater son époux a perdu l'usage d'une jambe en tentant de creuser un puits et ses deux enfants, Zhaya et Baorao sont encore trop jeunes pour l'aider. Leur voisin et ami Shenge, qui connaît de sérieuses difficultés avec sa femme, est régulièrement retrouvé ivre mort sur la route. Pour essayer de retenir son conjoint grâce à l'argent, celui-ci prend la décision de vendre tout ce qu'il possède afin d'acquérir un camion. En essayant de redresser la remorque de Shenge transportant son foin, Tuya est soudainement prise d'un malaise. Sa colonne vertébrale, affaiblit par les incessants efforts, doit à présent être ménagée. Tuya se résout à divorcer pour trouver un nouveau mari. Les prétendants ne tardent pas à se presser chez elle mais aucun n'accepte de cohabiter avec Bater, condition sine qua non fixée par son ex-épouse. C'est bientôt au tour de Baolir, un vieil ami d'enfance ayant fait fortune grâce au pétrole, de formuler sa demande en mariage. Il propose d'emmener Tuya et ses enfants dans la maison qu'il possède en ville après avoir placé Balter dans un foyer.
Tuya de hun shi est avant tout une jolie fable, narrée en flash-back, à la gloire de la femme, de l'entraide et des valeurs traditionnelles. Wang Quan'an, dont la mère est originaire du site où a été tourné le film, a voulu également apporter et conserver un témoignage sur un mode de vie et une culture condamnés par l'exploitation croissante des ressources naturelles de cette immense région autonome de la Chine. Une mélancolique évolution symbolisée dans le film par le personnage "urbain" de Baolir. S'il ne possède pas le souffle lyrique d'Urga ni même l'intensité romanesque des productions germano-mongols Die Geschichte vom weinenden Kamel et Die Höhle des gelben Hundes, ce troisième film à la saveur amère réalisé avec Yu Nan capte notre attention et sait nous séduire parfois aussi.
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