jeudi 3 avril 2008

Orae-doen jeongwon (le vieux jardin)


"... Et cesse de faire des choses que tu regretteras !"

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Récompensé par le "Grand prix" du Festival du film asiatique de Deauville, le féministe Baramnan gajok, troisième production de Im Sang-soo, ne manquait assurément pas d'intérêt. Orae-doen jeongwon, séparé de celui-ci par le poli-drôlatique Geuddae geusaramdeul, est lui tout simplement un beau film. D'importants et tragiques évènements politiques servent d'ailleurs encore de toile de fond* à cette mélancolique histoire d'amour librement adaptée du roman à succès, publié en 1998, de Hwang Sok-yong, l'un des principaux représentants de la littérature réaliste et sociale de Corée du Sud, quoique résidant en France.
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Après presque dix-sept ans de réclusion pour troubles à l'ordre public, Oh Hyun-woo est libéré de prison. Il retrouve sa famille avant de partir pour Kwangju à la rencontre de Kun et de ses autres anciens camarades militants, rescapés et libres, avec lesquels il avait participé aux manifestations de mai 1980, réprimées avec une violence terrible par les forces de l'ordre. Mais ses souvenirs le ramènent surtout vers ce petit pavillon, isolé au milieu de la nature, où l'enseignante Han Yoon-hee l'avait caché quelques temps de la police. La jeune femme, devenue rapidement son amante, n'avait cependant pas réussi à le dissuader de retourner, malgré le danger, à Séoul.
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"... Ce qui reste inachevé dans ce monde est beau, n'est-ce pas ?" Né en Mandchourie, témoin à l'âge de sept ans de la guerre de Corée puis de la partition du pays après avoir vécu successivement à Pyongyang et à Séoul, Hwang Sok-yong est un écrivain idéaliste, dissident sous la dictature et militant du rapprochement avec le Nord pour lequel il fut condamné à une peine de sept ans d'emprisonnement. Ces éléments éclairent sur le sens et la tonalité de l'ouvrage dont est tiré Orae-doen jeongwon. Le soulèvement de Kwangju constitue évidemment l'écho tardif des fameuses révoltes ayant éclaté, douze ans plus tôt, aux Etats-Unis, en Europe et au Japon qu'évoque le roman. La dimension dramatique, les aspirations utopiques des changements politiques intervenus au cours de ces époques était le thème central de celui-ci. Le rendez-vous sentimental raté et la sortie d'une longue adolescence opérée malgré lui par personnage principal servant de figures narratives métaphoriques. La traduction qu'en a faite Im Sang-soo apparaît à la fois plus pessimiste et cynique. Le cinéaste associe aux qualités intrinsèques du matériau littéraire, même remanié, sa finesse, sa sensibilité, son indéniable sens esthétique et son intelligence affirmée dans le choix des interprètes. Un beau film, vous dis-je !
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*qui ont inspiré également "Chonri" (1983), le premier roman de Lee Chang-dong, et une autre très belle adaptation, Ggotip de Jang Sun-woo.

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