mercredi 26 août 2015

Young Man with a Horn (la femme aux chimères)

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"... I got lost."

Depuis The Jazz Singer (premier film parlant doté, également pour cette raison, d'une valeur symbolique forte) déjà produit par la Warner, cinéma et jazz entretiennent, de la simple évocation (par ex. au moyen de la bande originale) jusqu'au sujet principal du récit, d'étroites et régulières relations. Adapté du roman best-seller éponyme de Dorothy Baker publié en 1938, Young Man with a Horn1 constitue l'une des toute premières productions hollywoodiennes consacrées à un musicien. Bien qu'inspiré par Bix Beiderbecke2, ce drame n'est pas un biopic (comme le sera, quatre ans plus tard, The Glenn Miller Story d' avec ). Il développe plutôt les thèmes de la passion musicale et instrumentale précoce, quasi exclusive, de la filiation et de l'engagement artistiques désintéressés. Le projet, porté dès octobre 1941 par Benjamin Glazer associé à Theodore Reed (qui devait en assurer la direction), est finalement repris par Jerry Wald3 (Mildred Pierce) pour la Warner à partir d'un scénario co-signé par 4 et  (Patton).
Le film perd, hélas, peu à peu sa justesse de ton mais aussi une partie de son intérêt narratif. La troisième partie, à la fois improbable et convenue, détonne singulièrement par rapport aux précédentes. Difficile en effet de saisir les motifs et la nature exacte de la relation qui se noue entre le virtuose Rick Martin et la riche dilettante Amy North (la "femme aux chimères" du titre français), si opposés qu'elle apparaît artificielle, voire caricaturale. Une impression en outre renforcée par la disharmonie du couple -5. La participation, discrète mais opportune, de la délicieuse 6 , celle du Portoricain  (remarqué dans la récente adaptation Intruder in the Dust) et la photographie de l'expérimenté Ted D. McCord (The Treasure of the Sierra MadreJohnny Belinda) représentent quelques uns des atouts de cette production. Insuffisants cependant pour faire de Young Man with a Horn un authentique bon film.

N.B. :
- titulaire du personnage de Willie 'Smoke' Willoughby et narrateur de cette fiction, le pianiste-chanteur-compositeur (notamment de l'inoubliable "Georgia in My Mind" de Ray Charles)  avait été l'ami et le partenaire de Bix Beiderbecke au cours de la seconde moitié des années 1920. Dans To Have and Have Not, il accompagnait  alias Marie 'Slim' Browning sur la chanson "How Little We Know".
- le trompettiste et chef d'orchestre Harry James (grâce auquel Frank Sinatra débuta en 1939 sa carrière professionnelle de chanteur) double  pour les parties instrumentales.
- le Bolognais  a produit et réalisé en 1991 un biopic intitulé Bix (candidat à la 47e "Palme d'or") avec  dans le rôle-titre.
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1. titre emprunté par Dorothy Baker à celui des deux articles écrits en juin 1936 par son ami critique Otis Ferguson dans le magazine "New Republic". Miles Davis le reprendra pour son deuxième album studio enregistré en mai 1952.
2. cornettiste soliste blanc et compositeur des années 1920, Beiderbecke se démarqua de ses contemporains, parmi lesquels les célèbres Joe 'King' Oliver et Louis Armstrong, par son jeu (phrasé en legato, douceur du timbre, tonalité mélancolique) précurseur du cool jazz des 1950's. A la différence de Rick Martin, Beiderbecke n'était pas orphelin et ne s'est jamais marié (on ne lui connait d'ailleurs aucune compagne féminine). Alcoolique impénitent, Il est décédé d'une pneumonie à l'âge de vingt-huit ans, ouvrant un nouveau chapitre dans la légende un peu éculée de l'artiste maudit.
3. entré en 1934 à la Warner comme scénariste (notamment de The Roaring Twenties) puis en tant que producteur en titre à partir de 1942.
4. nommé, quelques semaines après la sortie du film, pour la première fois aux "Oscars" grâce au drame pugiliste Champion avec  dans le rôle principal.
5. absente des écrans depuis Key Largo (1948) pour cause de maternité. L'actrice sera l'une des deux vedettes féminines de Bright Leaf, le film suivant de . Elle tournera également une seconde fois avec  dans la comédie Diamonds (1999).
6. l'actrice et chanteuse tenait ici son quatrième rôle, le troisième des quatre sous la direction de .






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