"... Jusqu'à ce que la mort nous sépare."
Lorsqu'ils ne collaborent pas avec des cinéastes aguerris, les frères Weinstein ont pris l'habitude d'élever, dans leur pépinière de production, des réalisateurs presque inconnus tel John Gulager. Les deux anciens co-présidents de Miramax ont ainsi également permis à Joby Harold, époux de la productrice Tory Tunnell (Trumbo), de signer son premier film. Doté d'un budget confortable, d'un casting inédit et a priori séduisant, Awake tente d'instiller, dans la veine du remarquable court métrage d'Adam Kargman Anesthesia ou de Ri-teon du Coréen Lee Hyeon-jin, sa dose d'originalité dans le segment un peu encombré du thriller (médico-)psychologique.
Le dr Jack Harper enregistre, en ce jeudi 1er novembre, un nouvel et dramatique échec professionnel. La transplantation cardiaque qu'il a tentée sur Clayton Beresford Jr. a été fatale pour son jeune patient et ami. L'héritier de l'empire industriel et financier constitué par son père, mort accidentellement alors qu'il était encore enfant, attendait depuis de long mois, tout en la redoutant, cette intervention après avoir été victime d'une attaque sérieuse. Entre-temps, Clay avait débuté une liaison amoureuse avec Sam(antha) Jane Lockwood, une collaboratrice engagée par sa possessive mère Lilith, sans jusque-là oser l'avouer à celle-ci. Lilith insiste par ailleurs, mais en vain, pour que son fils confie la délicate opération qu'il doit subir au dr Jonathan Neyer, vieille connaissance et autorité reconnue dans le domaine de la chirurgie cardiaque, plutôt qu'à Harper, déjà sous le coup de quatre plaintes de patients pour défaillance professionnelle. Lorsque Clay, pressé par Sam, trouve enfin le courage de révéler sa relation, Lilith l'oblige à choisir entre elle et la jeune femme, levant ainsi tout obstacle à un mariage immédiat. Au moment où il s'apprête à consommer leur union conjugal, le couple est averti de la disponibilité d'un cœur compatible. Admis à l'hôpital et aussitôt emmené au bloc opératoire, Clay y reçoit une anesthésie préparée par un remplaçant. Il constate pourtant bientôt, avec effroi, qu'il reste totalement conscient des conversations et des actes des médecins.
Après l'amnésie ou les insomnies, certains scénaristes semblent donc vouloir porter un intérêt particulier à l'anesthesia awareness ou conscience anesthésique, phénomène rare (0,1 à 0,2% des narcoses préopératoires) mais néanmoins très inquiétant. Naturellement (pourrait-on dire !) pourvu d'un formidable potentiel de tension dramatique, ce puissant ingrédient narratif, dont on ne sait jamais de façon claire s'il est accidentel (et donc incompatible avec un autre élément déterminant du script) ou sans grande vraisemblance provoqué, entraîne nécessairement le scénario vers une sorte de virtualité surnaturelle. Une projection stylisée à laquelle n'avait, par exemple, pas eu recours Stephen Zakman pour mettre en scène Autopsy Room Four, son surprenant premier court métrage inspiré par Stephen King. Le rebondissement post-flashback apparaît plutôt astucieux et bien conduit. La direction d'acteurs manque en revanche un peu de rigueur, notamment à l'égard de Terrence Howard qui peine toujours à convaincre. Sans pour autant porter sévèrement atteinte à la prestation du couple vedette (remplaçant du duo lui aussi inédit Kate Bosworth-Jared Leto), toutefois affaiblie par comparaison avec l'interprétation de la bergmanienne Lena Olin*.
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*dans un rôle pour lequel Helen Mirren et Sigourney Weaver ont un moment été pressenties.
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