vendredi 27 août 2004

The Bourne Identity (la mémoire dans la peau)


"Une arme de trente millions de dollars qui fonctionne mal."

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Il est toujours intéressant de revoir un film après quelques années pour confirmer une première impression, forcément fugitive. L'actualité cinématographique et "vidéographique" est dense et il faut faire des choix. Un second visionnage devient presque un luxe (je n'évoque même pas ceux qui parlent d'un film sans être allé au bout du premier). C'est aussi l'actualité qui, en grande partie, est à l'origine de cette "seconde lecture" : la sortie, toute prochaine, du second épisode des aventures de Jason (sans argonautes !), The Bourne Supremacy, et l'édition d'une nouvelle édition DVD du premier... alors que se profile déjà l'éventualité d'une trilogie. Histoire de faire presque aussi bien que le collègue Jack Ryan ? Il est amusant de souligner, à ce propos, le contraste entre les deux "caractères". Jack Ryan était une brillante mécanique intellectuelle (même avec Affleck dans le rôle ?!) entraînée malgré elle dans l'action. Jason Bourne, à l'inverse, est une machine physiquement redoutable à laquelle l'esprit est assujetti. Bien que se situant, en terme de box-office, derrière les deux opus de Mission: Impossible, le film de Doug Liman peut être qualifié de succès public. Qu'en reste-t-il deux ans après ?
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(suite du résumé de la fiche-film) Jason Bourne (Matt Damon), qui a agressé deux policiers suisses, s'enfuit du consulat américain où il pensait trouver refuge et loue les services de Marie Helena Kreutz (Franka Potente), une jeune femme rencontrée sur place, pour l'emmener en voiture à Paris. Dans l'appartement qu'il est habituellement censé occuper, il est la cible d'un tueur qu'il réussit à neutraliser. Mais il ne parviendra pas à lui faire nommer ses employeurs, l'homme, contre toutes attentes, se précipite par la fenêtre et meurt. C'est le début d'une traque pour le couple, recherché à la fois par la police française et par une mystérieuse organisation, Treadstone, avec, pour toile de fond, la tentative avortée d'assassinat d'un ex-chef d'état africain.
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Adapté du roman éponyme de Robert Ludlum, auquel on doit déjà The Osterman Weekend de Sam Peckinpah, The Holcroft Covenant de John Frankenheimer et une première version télévisée, en 1988, avec Richard Chamberlain dans le rôle de Jason Bourne, The Bourne Identity est un film sérieux mais pas suffisamment emballant pour lui permettre de dépasser les limites du genre espionnage-action. Quatrième œuvre d'un jeune cinéaste très prometteur, la réalisation est appliquée, presque trop pour emporter définitivement l'adhésion. Pourtant, l'un de ses atouts est de mettre en vedette deux acteurs qui ne sont pas frappés de l'étiquette "glamour", que vous pourriez croiser dans la rue sans même les reconnaître. Cet anonymat cadre parfaitement avec l'esprit du roman et donne de la force au récit. Jason Bourne, pour peu que ce soit son authentique patronyme, en cherchant son identité et son passé, arrive à une conclusion : il n'est personne et, finalement, cela n'a pas d'importance. Un numéro de compte dans une banque suisse, un nom sur un registre d'hôtel... ou de morgue. Un des dialogues symptomatiques de cet état est le bref échange entre Bourne et le tueur chargé de l'éliminer dans la campagne bourguignonne : "Paris ? Londres ? Rome ?" lui demande ce dernier pour l'identifier avant de mourir.
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Dans le même temps, le personnage féminin de Marie (qui, de toutes évidences, n'était pas grand chose et ne savait pas ce qu'elle voulait avant d'être prise dans ce maelstrom) passe par une perte partielle de son identité (changements d'aspect et d'existence) pour parvenir à une autre vie, totalement inespérée, presque irréelle. La double influence de Matrix et de 24 est manifeste. The Bourne Identity se situe dans un monde de machines (Bourne en est une) où il faut, pour préserver un enjeu majeur, éliminer l'élément parasite. Il n'est pas anodin que le film soit baigné pendant presque tout le métrage dans des lumières artificielles (au passage, la photographie est plutôt réussie), dans des atmosphères assez sombres pour s'achever dans la tonalité de haute lumière de Corfou. Même les séquences diurnes, souvent urbaines, avec leur plans en altitude, font penser à des circuits imprimés. Perfectible, le film de Doug Liman aurait, probablement, pu être plus percutant, et pas seulement dans la bravoure de ses scènes d'action. On attend avec impatience de voir le deuxième épisode de la série, dirigé par Paul Greengrass, le réalisateur du remarquable Bloody Sunday.

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