"Donner des écureuils aux noix."
En 1943, sur le tournage de Heaven Can Wait
, Ernst Lubitsch
est victime de sa première crise cardiaque. L'année suivante, le contrat qui le lie à la Twentieth Century Fox Film Corp.
est reconduit pour trois ans, au terme duquel il doit avoir produit trois films. Le deux premiers seront A Royal Scandal
d'Otto Preminger
et Dragonwyck
de Joseph L. Mankiewicz
. Il est médicalement autorisé à diriger seul le troisième film : Cluny Brown
, tiré du best seller de Margery Sharp
paru en 1944. Ce sera sa dernière œuvre achevée puisque qu'il disparaîtra en 1947 pendant la réalisation de That Lady in Ermine
(Otto Preminger
sera chargé de le terminer). Il s'agit du seul film tourné par le réalisateur d'origine allemande avec Charles Boyer
et Jennifer Jones
et unique apparition du couple à l'écran. L'actrice, qui allait devenir, trois ans plus tard, Mrs David O. Selznick
,
ne doit sa présence à l'affiche qu'à l'autorisation express de son
découvreur et futur époux. C'est aussi sa seule prestation dans une
comédie.
Juin 1938. Adam Belinski (Charles Boyer
) et Cluny Brown (Jennifer Jones
) se sont croisé accidentellement chez Mr. Ames à Londres. Ils se retrouvent dans le manoir de Sir & Milady Carmel, les parents d'Andrew (Peter Lawford
), autre connaissance fortuite de la même soirée. Cluny y a été envoyée par son oncle pour être seconde femme de chambre des Carmel. Belinski est, quant à lui, invité par Andrew
qui admire l'écrivain et le philosophe tchèque, exilé pour ses
positions contre un nazisme au faîte de sa puissance, à la veille d'un
conflit en Europe inévitable. Une douce romance va naître* et, malgré
les obstacles, se développer* entre les deux "exilés".
Pour le béotien en "Lubitschy", le film possède un charme certain, bien qu'il ne s'y passe pas grand chose. Pour celui qui est déjà passé par les joyaux que sont To Be or Not to Be
, Ninotchka
ou encore The Shop Around the Corner
et Trouble in Paradise
, la déception est probable. On cherche, presque en vain, la fameuse touch
qui caractérise le génial créateur. Ce mélange de vivacité et
d'allégresse, d'humour subtil et satirique, d'inventivité des
situations, des personnages et des dialogues. Si la critique des
pesantes conventions et des (prédestinées) "classes sociales" britanniques fait mouche, tout comme la "mise en boîte" ironique de l'écrivain Hitler (cf anecdotes), il manque cette quasi frénésie et cet omniprésent esprit indissociables d'une comédie signée Ernst Lubitsch
. Est-ce l'absence du complice hongrois Melchior Lengyel
qui explique ce déficit ? Ou la faiblesse propre du récit de Margery Sharp
? Quoiqu'il en soit, et malgré ce handicap, cela reste un bon film du
réalisateur. Celui-ci réussit, tout en incorporant malicieusement les
séditieuses spontanéité et impulsivité du personnage féminin dans un
environnement figé et convenu, à opposer également, en trame de fond, la
trivialité individuelle et l'enjeu collectif inéluctablement tragique.
Les comédiens principaux et secondaires sont convaincants. On regrette
que Jennifer Jones
n'ait pas eu l'occasion de prolonger cette première expérience de comédie tant elle est à l'aise et efficace dans ce genre.
___
*grâce à la plomberie !














Juin 1938. Adam Belinski (Charles Boyer



Pour le béotien en "Lubitschy", le film possède un charme certain, bien qu'il ne s'y passe pas grand chose. Pour celui qui est déjà passé par les joyaux que sont To Be or Not to Be








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*grâce à la plomberie !
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