mercredi 11 juin 2003

Les Dames de la côte


Ce sont, paradoxalement, les femmes qui gagnent les guerres.

 - film - 8572_1Au moment du choix de cette critique, la question qui s'est (im)posée a été : qu'est-ce qui peut pousser un amateur de cinéma (surtout s'il n'était pas né au moment de sa diffusion) à acquérir et voir une série télévisée telle que Les Dames de la côte ? Précisons que, bien qu'amateur de séries, mes choix vont plutôt vers celles produites initialement pour le petit écran américain ou anglais. Par ailleurs, en 1979, les films de Nina Companéez n'exerçaient chez moi aucune attraction particulière, surtout s'il s'agissait de rester plus de sept heures (même épisodiquement) devant la télévision. Comme disait le Marquis embastillé : "j'avais d'autres chats à fouetter" (et il m'arrive de les fouetter encore !).
 - film - 8572_2Ceci étant posé, répondons à la question. Les Dames de la côte réunit plusieurs atouts : le discernement et le flair cumulés d'un grand monsieur de la télévision, Claude Barma, responsable, à l'époque, des fictions sur Antenne 2 et qui a véritablement impulsé une ambition cinématographique pour la télévision ; les réelles qualités d'écriture et de réalisation d'une femme de cinéma, Nina Companéez, qui a su transposer ses compétences filmiques au petit écran, en s'adaptant avec finesse notamment à son rythme particulier, surtout pour une première expérience de ce type ; enfin les talents conjugués d'actrices et d'acteurs confirmés et ceux de jeunes comédiens parmi lesquels l'héroïne centrale et narratrice, Fanny, la Ardant, notre Ingrid Bergman nationale, une quasi débutante (elle avait essentiellement tenu un petit rôle dans le film de 1978 d'Alain Jessua, Les Chiens). Cette série sera le point de départ de la carrière que nous connaissons (pas encore "magnifiée" sur notre site, un pur scandale !!) dont l'étape suivante sera, grâce à l'intelligence créative de François Truffaut, le personnage de Livia Cerasquier dans le très beau film de 1981, La Femme d'à côté (encore une histoire de côte !).
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Il n'est pas question de nous étendre sur les ressorts de l'histoire, la mémoire collective doit faire son œuvre. Cette saga familiale, normande et amoureuse des années 1911 à 1919 décrit avec justesse la période de légèreté et d'insouciance qui a précédé la première guerre mondiale et, par contraste, les effets dramatiques de cette dernière. Cette guerre, décrite du point de vue des femmes, comme l'avait suggéré Barma à Nina Companéez, révèle bien ici la dimension de tragédiennes des femmes (les hommes y sont, la plupart du temps, plus simplement, tragiques) comme elles consacrent leur nouveau rôle, leur émancipation dans une société elle même en renouvellement, en mutation. A noter, également, dans cette peinture sociale, l'importance accordée aux "gens de maison" (ils ont droit, comme les familles Villatte et Decourt, dans les suppléments, à leur propre arbre généalogique).
Les Dames de la côte est, assurément, une série réussie. Si elle se sert de la nostalgie comme d'un des moteurs narratifs, elle n'en a pas besoin pour que vous soyez tentés de vous laisser séduire.

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