lundi 1 novembre 2010

Street Angel (l'ange de la rue)


"We are going to climb... higher and higher!"

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Sont-ce ses racines européennes(1) qui poussent Frank Borzage à choisir le vieux continent comme cadre de ses drames romantiques ? Succédant à Paris, c'est en effet la capitale(2) de la Campanie qui sert de cadre à cette seconde et libre adaptation de "The Lady Cristilinda", le roman de l'ancien acteur irlandais Monckton Hoffe, après celle montée à Broadway en décembre 1922. Une cité portuaire jouissant d'une persistante réputation avec laquelle s'accordent parfaitement les thèmes développés dans Street Angel. Assisté par une équipe technique sensiblement identique (excepté pour le montage, Barney Wolf remplaçant le duo Katherine Hilliker-H.H. Caldwell chargé ici des intertitres) à celle du précédent film, Borzage reconduit également l'office du couple vedette Janet Gaynor-Charles Farrell, tant apprécié du public dans Seventh Heaven.
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Naples. En l'absence de toute ressource pour acheter le remède nécessaire à sa mère malade, Angela est réduite à tenter en vain de monnayer ses charmes puis de dérober quelques billets. Interpellée par deux carabiniers, traduite en justice pour vol et racolage, elle est condamnée à un an de camps de travail. Pendant son transfert, Angela parvient à s'échapper, retourne chez où elle découvre le cadavre de sa mère avant d'être dissimulée dans sa fuite et recueillie par des membres du cirque dirigé par Masetto dont elle devient l'une des artistes. Au cours de leur itinérance, elle rencontre Gino, un jeune peintre qui fait concurrence à son spectacle. Celui-ci s'éprend rapidement d'une Angela dédaigneuse à l'égard de l'amour. Séduite par son talent et par sa vision d'elle illustrée par le portrait qu'il a réalisé, elle finit par répondre à ses sentiments. Mais effrayée par des policiers, elle se brise la cheville en chutant pendant son numéro ; contrainte de quitter la troupe, elle est ramenée par Gino à Naples pour y être soignée.
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La principale faiblesse potentielle du mélodrame réside dans la répétition. Une menace qu'ont su en permanence résoudre les talentueux D.W. Griffith et Douglas Sirk. Frank Borzage s'en sort un peu moins bien. Ne retrouve-t-on pas dans Street Angel ce confiant espoir d'ascension, cette solidarité entre démunis, ce sursis amoureux et ce final élan mystique déjà si prégnants dans Seventh Heaven ? Le scénario co-signé par Marion Orth (City Girl) souligne certes, en les associant, le caractère trompeur des apparences et l'injustice des hommes(3). Mais est-ce suffisant pour impulser une force dramatique singulière à ce récit pour l'essentiel sentimental. La variété des personnages successivement endossés par Angela (fille vertueuse, apprentie raccrocheuse-voleuse, inculpée - dont on ne perçoit que le haut du visage ! -, acrobate orpheline adoptée, amante puis figure iconique) frappe en revanche davantage. Et l'on retient aussi volontiers du film les jeux d'ombres et de lumières et la superbe séquence des retrouvailles, héritage esthétique de l'expressionnisme (wiénérien, wegenérien, languien ou murnauien).
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1. ou la volonté de William Fox, occupé entre-temps à produire une série de comédies, de privilégier l'exotisme. A moins qu'il ne s'agisse d'escamoter la représentation de la misère aux Etats-Unis, d'autres (Chaplin...) s'en chargeant fort bien... avec humour !
2. fondée sous le nom de Parthenope, i.e. "vierge" en grec.
3. sévère pour la vénalité contrainte, aveugle à l'égard des faussaires.

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