mardi 7 juillet 2009

Gran Torino


"Oh, I am at peace."

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Désormais moins présent à l'écran, Clint Eastwood redouble d'activité comme réalisateur... les années paires*. Générosité logique lorsqu'il s'agissait de remémorer par un remarquable diptyque la bataille d'Iwo Jima. Pure prodigalité, au sens noble du terme, en dirigeant coup sur coup deux drames très différents, Changeling pour Universal et ce Gran Torino pour la Warner. L'alchimiste Clint en profitait même pour transformer en or l'a priori un peu ingrat scénario de deux illustres inconnus, Nick Schenk et Dave Johannson. Ce film, avec lequel il met un terme à sa jubilaire carrière d'acteur, constitue en effet son plus gros succès public aux Etats-Unis** (et en France).
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Walt Kowalski vient de perdre son épouse Dorothy. Sans lien véritable avec ses deux fils Mitch et Steve, ce vétéran d'origine polonaise de la guerre de Corée, ancien ouvrier des usines Ford de Detroit, se retrouve seul en compagnie de sa chienne Daisy. D'abord harcelé par le jeune prêtre Janovich, tenu par sa promesse à la défunte de confesser son réfractaire mari, Kowalski découvre ensuite l'envahissante présence de ses voisins asiatiques à l'occasion d'une cérémonie rituelle de naissance. Régulièrement méprisé pour sa docilité par les membres du gang hmong, le cadet de la famille, Thao, se laisse imposer une épreuve initiatique : voler la convoitée Gran Torino 1972 que Kowalski entretient avec un soin méticuleux. La tentative échoue mais elle rapproche paradoxalement le retraité d'origine polonaise du fils de Vu et du frère de Sue qu'il surnomme rudement 'Toad'.
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Désigné par l'American Film Institute comme l'un des dix meilleurs films de 2008, Gran Torino pourrait bien paraître, de prime abord, terriblement stéréotypé. C'est, en réalité, tout le contraire. La difficulté, a posteriori, consistant à (tenter de) déterminer la contribution spécifique des scénaristes et du cinéaste aux qualités réelles de cette classique production de grand studio. Mis en scène sans inspiration, ce drame "générationnel" aurait probablement connu la relative confidentialité des pages qui l'ont en substance inspiré, celles des faits divers. Avec Clint Eastwood à la manœuvre, cette histoire prend un relief étrangement morose et nostalgique. Et même s'il s'amuse à caricaturer (à la manière d'un vieux chien grincheux) son personnage tourmenté par son passé, (dé)voué davantage à la mort qu'à la vie, l'acteur n'empiète jamais sur les subtiles nuances qu'il donne au récit et à la réalisation. Comme Unforgiven pour le western, Gran Torino représente ce qui pourrait bien être un ultime témoignage, l'éloge funèbre d'une époque et d'une morale révolues, celles des alliances inattendues et du sacrifice. Du grand Clint !
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*déjà en 1990, avec White Hunter Black Heart et The Rookie.
**produit avec un budget d'environ 33-35M$, le film a enregistré des recettes de 236M$ dont 148M$ dans son pays, soit mieux que Mystic River (90M$) et Million Dollar Baby (100M$).

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