"Une habitude peu édifiante ?"
Le Britannique David Mackenzie prendrait-il goût aux adaptations ? Hallam Foe, tiré du premier roman de son compatriote et ami Peter Jinks, constitue en effet, après Young Adam et le décevant Asylum, sa troisième réalisation consécutive de ce genre. Produit par l'Ecossaise Gillian Berrie, collaboratrice des cinéastes danois Susanne Bier et Lars von Trier notamment, avec laquelle il a signé un de ses premiers films et son premier long métrage, ce drame familial et sensible (plus que sentimental) se montre tout à la fois surprenant et réellement attachant. Présenté en compétition à la 57e Berlinale, Hallam Foe a obtenu depuis plusieurs récompenses européennes, parmi lesquelles l'"Hitchcock d'or" et le prix de la meilleure photographie du Festival du film britannique de Dinard 2007.
Depuis qu'il a perdu, deux ans plus tôt, sa mère Anne Sarah officiellement suicidée par noyade, Hallam Foe se réfugie le plus souvent dans la cabane construite pour lui par Julius, son père architecte, dans un arbre de la vieille et vaste propriété familiale. De là, il a pris l'habitude d'observer les gens aux jumelles et d'en noter le résumé dans des carnets conservés dans une malle métallique. Lorsque sa sœur Lucy décide de partir pour l'Australie, Hallam y voit l'influence grandissante de sa jeune belle-mère Verity, soupçonnant même cette dernière d'être à l'origine, voire l'auteur de la mort de sa mère. Grâce à une ruse perfide, Verity obtient le départ de l'orphelin tourmenté. Lors de ses errances à Edimbourg, Hallam croise une jeune femme qu'il croit d'abord être sa mère. Responsable du service du personnel d'un grand hôtel de la ville, Kate Breck, dont la forte ressemblance avec la défunte s'avère en effet troublante, accepte de prendre Hallam à l'essai pour un emploi de cuisine. Ayant repéré le logement de Kate, Hallam s'y introduit avant d'être obligé, par l'arrivée de celle-ci, de se réfugier sur le toit du bâtiment d'où il ne peut résister à la tentation de l'observer à travers les fenêtres de l'appartement.
Drame psychologique de la post-adolescence additionné d'une persistante intrigue possiblement criminelle, Hallam Foe, sorte d'hybridation moderne de Tom Sawyer et d'Huckleberry Finn, apparaît néanmoins avant tout comme le récit plutôt intelligent, pudique et dans le même temps provocateur d'une mutation. Celle menant du stade de l'enfance, fragilisé par la perte de l'être le plus cher et d'un simple spectateur de la vie d'autrui, à celui d'un adulte, débarrassé des résidus de sa chrysalide, enfin apte à mener sa propre existence (le sourire final du personnage central ne laisse aucune ambiguïté sur le sujet). Pour raconter cette délicate histoire, David Mackenzie a su utiliser une jolie palette contrastée de sentiments, et, avec l'aide de son talentueux chef-op. Giles Nuttgens (direct. de la photographie, entre autres, sur la remarquable trilogie élémentaire indo-canadienne de Deepa Mehta), de lumières et de couleurs. On pense assez spontanément, malgré leurs différences formelles, au Igby Goes Down, le réussi premier film de l'Etasunien Burr Steers. Et l'on loue la qualité des interprétations, en particulier celles de Sophia Myles et, bien sûr, de l'omniprésent Jamie Bell, auteur d'un très étonnant et convaincant parcours d'acteur depuis son apparition dans le rôle-titre de Billy Elliot. Hallam Foe est, sans hésitation, une œuvre chaleureusement recommandable.
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