mardi 17 janvier 2012

Talk Radio (conversations nocturnes)


"Sticks and stones can break your bones but words cause permanent damage!"

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Entre deux drames de studio à gros budget(1), Oliver Stone porte à l'écran la pièce montée off-Broadway en mai 1987 par Eric Bogosian et Tad Savinar à partir de l'ouvrage de Stephen Singular(2). Cette troisième(3) collaboration avec le producteur new-yorkais Edward R. Pressman (Badlands, Phantom of the Paradise...), quasi huis clos psychologique, reste l'un des films consacrés au discours (provocateur et controversé) les plus surprenants de la production étasunienne. Deuxième film de Stone(4) sélectionné en compétition à la Berlinale, Talk Radio valut à Bogosian, dans son premier rôle significatif au cinéma, un "Ours d'argent" récompensant à la fois l'écriture du scénario et l'interprétation.
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Animateur de l'émission radiophonique "Night Talk" programmée sur KGAB (Dallas), Barry Champlain a fondé sa contestée célébrité grâce aux brefs et souvent polémiques dialogues avec des auditeurs de la station. Au cours d'une interruption musico-publicitaire, Dan le directeur lui présente Chuck Dietz, vice-président de Metrowave installé à Chicago. Le groupe de communication a en effet conclu un contrat avec KGAB en vue d'une diffusion nationale du réputé talk-show de divertissement dès le lundi suivant. A la reprise, Champlain formule en direct sur les ondes son accord à l'égard de cette transaction avant de prendre en ligne un certain Chet de Mesquite. Pour répondre aux très peu amènes propos, à caractère racial, de l'individu concernant les sujets abordés au cours de l'émission, Champlain évoque le nazisme en l'illustrant par le souvenir d'une visite dans un camp de concentration.
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Talk Radio scrute, de manière souvent saisissante, l'incontrôlée déviation/déviance cynique d'un railleur radiophonique plus qu'elle ne soulève, avec une délibérée économie de moyens, la question de l'influence d'un média. Rhéteur égocentrique, volontiers captatif et manipu-fabulateur, Barry Champlain abuse évidemment d'un rapport de situation défavorable pour ses interlocuteurs. Sans mesurer la réelle portée, potentiellement destructrice, de son discours. Comme Lenny, mais de façon néanmoins très dissemblable(5), le film du duo Eric Bogosian-Oliver Stone fait le récit d'une victime trop peu consciente de l'animosité qu'elle suscite. Entouré avec une efficace discrétion par Alec Baldwin, Leslie Hope, John Pankow (vu chez Friedkin puis Lumet notamment) et surtout Ellen Greene, Bogosian offre une prestation suffisamment formidable pour justifier, à elle seule, la (re)découverte de cet intéressant drame psycho-socio-médiatique.
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1. Wall Street (15M$) promu par la Fox et Born on the Fourth of July (14M$) pour Universal.
2. "Talked To Death: The Life and Murder of Alan Berg", animateur de talk-shows assassiné en juin 1984 et point de départ du Betrayed de Costa-Gavras.
3. après The Hand et Wall Street, quatrième si l'on tient compte de Conan the Barbarian sur lequel Stone était co-scénariste.
4. Platoon lui avait permis d'y obtenir, deux ans auparavant, le prix du meilleur réalisateur.
5. ou que les postérieurs Pump up the Volume (avec également Ellen Greene dans un rôle plus secondaire) et Private Parts.

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