mercredi 19 janvier 2011

Incompreso (l'incompris)


"... Je le croyais invulnérable, et c'était lui le plus fragile."

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Serti entre deux comédies plutôt moyennes (surtout jugées à l'aune du futur Lo Scopone scientifico), ce joyau dramatique reste assurément l'une des œuvres maîtresses du Lombard Luigi Comencini. Adapté du "Misunderstood", publié en 1869, de la romancière londonienne Florence Montgomery par un quatuor de scénaristes parmi lequel le duo Leonardo Benvenuti-Piero De Bernardi et Giuseppe Mangione (Gli innamorati, In nome della legge...), Incompreso focalise comme peu d'autres films son attention, sa tension sur une relation père-fils. Première des trois sélections à Cannes de Comencini, cette collaboration avec le Milanais Angelo Rizzoli(1) permit au réalisateur d'obtenir son unique "Premio David di Donatello".
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John Edward Duncombe vient de perdre Adelaide, sa jeune épouse italienne. L'occupé consul britannique à Florence doit confier ses deux fils Andrea et Milo à une gouvernante nommée Luisa. L'aîné promet à son père de ne pas révéler le décès de leur mère à son jeune et maladif frère, objet de l'attention particulière du diplomate. S'il ne semble pas trop affecté par sa nouvelle situation d'orphelin, Andrea se montre toutefois plus proche et complice de Milo, étroitement surveillé par la nurse. Livré un peu à lui-même, il occupe son temps libre à jouer avec ce dernier, s'exposant ainsi parfois aux reproches de son père, ou à se tester à "l'audaciomètre" (mesuré par les craquements d'une branche d'arbre surplombant le lac à laquelle il se suspend). Une nuit d'orage, Andrea, qui a accepté de partager son lit avec Milo effrayé, tente sans trahir sa promesse de lui expliquer la raison de l'absence de leur mère. En présence de son père, Milo déclare que celle-ci est morte.
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Chronique d'un malheur prédestiné ou évitable ? Au contraire de la plupart des récits sur ce thème(2), Incompreso ne détourne pas le sien de cette progressive, implacable disjonction s'opérant entre un père absent, aveuglé par sa propre douleur et ses a priori, et un préadolescent en position réelle ou illusoire d'abandon. La gravité ne semble d'ailleurs pas vouloir le quitter, même lors des épisodes apparemment plus insouciants et légers (achat d'un cadeau d'anniversaire, bref séjour de l'oncle Will, déjeuner avec les étudiants de la délégation africaine...). Quelques raccourcis narratifs ou le choix d'un superbe mais rebattu extrait de concerto pour piano de Mozart nuisent en revanche un peu à cette tragédie en exécution. Sobre, le comédien Anthony Quayle trouve ici l'occasion de redonner de l'éclat à une seconde partie de carrière régentée par la télévision face au probant jeune Romain Stefano Colagrande, dans son unique apparition au cinéma, sur lequel repose le film. Près de vingt ans plus tard, Gene Hackman et Henry Thomas reprendront ces rôles dans l'adaptation italo-étasunienne du roman(3) réalisée par Jerry Schatzberg.
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1. producteur parmi d'autres de Vittorio De Sica, de Fellini ou de Antonioni notamment, avec lequel il travaillera une seconde fois pour Italian Secret Service.
2. où dominent en particulier et dans des registres distincts The Champ, Ladri di biciclette et East of Eden.
3. également à l'origine de deux productions télévisuelles.




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