jeudi 28 avril 2016

Ex Machina

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"Caleb, you have to help me."

Remarquable première réalisation du Londonien 1, Ex Machina apparaît vite comme une œuvre assez captivante, à la croisée des chemins entre film de science-fiction réaliste et drame psychologique en (quasi) huis clos. Dans un segment (celui des humanoïdes et de l'intelligence artificielle2) plutôt fécond, cette production britannique pilotée par l'Ecossais Andrew Macdonald3 réussit en effet à faire preuve d'une réelle originalité, tant sur le plan narratif que formel. L'auteur de The Beach inscrit son récit dans un futur proche, n'ayant pas connu de saut technologique et/ou environnemental trop conséquent.
Brillant programmeur au sein de BlueBook, société de services informatiques notamment du plus utilisé moteur de recherche, Caleb Smith découvre un matin qu'il est l'heureux gagnant d'une loterie réservée au personnel. L'employé est ainsi invité à passer une semaine chez Nathan Bateman, le président-fondateur de l'entreprise. Reclus dans une demeure innovante, placée sous protection permanente au cœur d'un site isolé en montagne, celui-ci y a conçu et réalisé un robot humanoïde nommé Ava. Nathan souhaite profiter de la présence, présumée informelle et amicale, de son collaborateur pour lui proposer de soumettre Ava au test de Turing. Au cours des sept sessions d'entretien, Caleb va peu à peu s'attacher à son insolite interlocutrice, découvrant dans le même temps la nature narcissique et cruelle de son hôte adepte de boissons alcoolisées.
L'astucieux scénario imaginé par 4 mêle étroitement des enjeux technologiques et humains. L'histoire joue volontiers aussi sur les contrastes : résidence abritant un centre de recherches avancées implantée dans un environnement naturel préservé (splendides paysages norvégiens), cohérence apparente-désordre/trouble intérieur, lumière tamisée-alerte rouge de panne électrique étant, de ce point de vue, les plus symboliques ou chargés de sens. Sans évoquer, bien entendu, les récurrentes, implicites rivalités entre supérieur et subalterne (illustration fragmentaire de la classique dialectique hégélienne maître-esclave), entre homme et machine. Dans un décor presque édénique, cette intrigue triangulaire va se nouer selon un inexorable crescendo dramatique. A l'exception de quelques furtifs éléments ajoutés en post-production, la réalisation opte pour une efficace sobriété. La prestation de l'Irlandais , du Guatémaltèque  (Inside Llewyn DavisA Most Violent Year) et de la Suédoise 5 (The Danish Girl) se montre à la hauteur des ambitions d'Ex Machina.

N.B. : récompensé par l'un des deux "Prix du jury" 2015 à Gérardmer, le film a été nommé dans cinq catégories (dont l'"Alexander Korda Award" du meilleur film britannique et celle du meilleur scénario original) des 69e BAFTA, oscarisé peu après pour ses effets visuels (succédant au palmarès à Interstellar). Doté d'un budget d'environ 15M$, Ex Machina a connu un joli succès commercial (près de 37M$ de recettes dont plus de 25Ms aux Etats-Unis).
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1. scénariste de 28 Days Later... (2002) et de Sunshine (2007) de  mais aussi et Dredd (2012).
2. segment dans lequel apparaît, entre autres, The Stepford Wives (1975) tiré du roman d' et Artificial Intelligence; AI (2001) fondé sur le court récit de .
3. le frère aîné du cinéaste Kevin Macdonald, producteur notamment du Trainspotting de , associé une nouvelle fois à Allon Reich.
4. dès son adolescence puis peaufiné par l'écrivain, en partie inspiré par la pièce "The Tempest" de William Shakespeare.
5. Gleeson et Vikander avaient déjà été partenaires dans Anna Karenine (2012).  Felicity Jones a été pressentie pour le rôle d'Ava.




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