lundi 29 février 2016

The Golden Coach (le carrosse d'or)

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"At the end of the second act, when Columbine goes, driven away by her masters, there's a tradition that you seem not to know... the comedians bow to her."

Après sa période hollywoodienne, suivie de l'escapade indienne pour le tournage in situ du remarquable The River regagne le Vieux Continent quitté en octobre 1940. Il accepte peu après la proposition faite par Francesco Alliata1, une adaptation du "Carrosse du St-Sacrement", la comédie en un acte de Prosper Mérimée. Une production franco-italienne destinée en priorité aux marchés anglophones et, pour cette raison, écrite par le groupe de scénaristes2 puis réalisée à Cinecittà dans la langue de Shakespeare3 s'affranchit largement des options initiales ; la comédie en un acte4 de l'auteur académicien (surtout connu pour ses nouvelles) n'est d'ailleurs pas mentionnée. Pour le cinéaste parisien5The Golden Coach constitue surtout une opportunité d'aborder pour la première fois6 un thème qui lui est cher, celui des artistes de spectacle vivant, rendant pour l'occasion un hommage autant appuyé que plaisamment amusé à la commedia dell'arte.
Le véhicule hippomobile, dérisoire symbole d'un pouvoir (politique ou de séduction) versatile et aisément contrarié, donnant son titre au film transporte en réalité un intéressant vecteur narratif à base de confrontations. Celle d'abord entre comédien et gouverneur aux similitudes plus nombreuses que supposé ; ensuite celle entre interprétation/affectation et naturel/sincérité. L'intensité dramatique de ce quadrilatère amoureux apparaît néanmoins toute relative,  l'affublant volontiers d'une tonalité proche de celle d'une saynète. Mais l'élément le plus surprenant de The Golden Coach, outre sa stylisation (déjà à l'œuvre, de façon il est vrai moins flagrante, dans le précédent film) appuyée par l'emploi du Technicolor, reste l'interprétation d'. Sans doute en partie désarmée en raison de sa méconnaissance de la langue anglaise, l'actrice romaine révélée par Vittorio De Sica et par le cinéma néo-réaliste de Roberto Rossellini offre en effet une prestation totalement insolite pour ceux qui ne la connaissaient qu'à travers Roma città aperta ou dans le récent drame historique Camicie rosse. Face à des acteurs assez méconnus (parmi lesquels l'Etasunien , le Britannique  ou encore le comédien français  dans la séquence finale), la (quadragénaire)  réussit le tour de force de rendre son personnage de jeune comédienne et libre courtisane plutôt plausible et touchant.

N.B. : admirateur enthousiaste du film, François Truffaut a dénommé pour cette raison sa société de production Les Films du Carrosse.
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1. deuxième des six films produits par le producteur palermitain. Le projet avait d'abord été engagé par Luchino Visconti.
2. composé, outre Renoir, de Jack Kirkland, de Renzo Avanzo, du réalisateur lombard Giulio Macchi et de la script Ginette Doynel.
3. faute de moyens suffisants, le tournage en version française a été interrompu au profit d'un doublage que Renoir rejettera.
4. publiée en juin 1829 et et montée au Théâtre-Français en mars 1850. La pièce est inspirés de la comédienne péruvienne Micaela Villegas surnommée "la perra chola", la Périchole en français également à l'origine de l'opéra-bouffe (1868) du compositeur Jacques Offenbach.
5. désormais doté, comme son fils Alain (et celui de sa première épouse, l'actrice Catherine Hessling), d'un passeport étasunien.
6. et prolongé juste après par French Cancan (1954) et Elena et les hommes (1956).






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