"- On n'augmente jamais celui qui garde l'argent des autres. Précaution : de peur qu'il se mette à aimer l'argent lui aussi.
- Moi j'adore les épinards à la crème... Et pourtant... je n'en mange jamais."
- Moi j'adore les épinards à la crème... Et pourtant... je n'en mange jamais."
Le terme "rififi" (qui signifie bagarre en langage argotique) était en vogue dans les années 1950 et 1960, notamment sous la plume d'Auguste Le Breton* (l'auteur de l'histoire ayant inspiré ce film) qui l'utilise dans plusieurs des titres de ses romans ou mémoires. De la baston, il y en a dans Rififi à Tokyo**, mais il semble que ce ne soit pas l'objectif thématique principal de Jacques Deray pour son deuxième film.
Récit d'un casse de banque au Japon, le film met en scène son organisateur, Van Hekken (Charles Vanel),
et l'équipe qu'il a réunit pour parvenir à pénétrer nuitamment dans
l'établissement, déjouer les protections électroniques et physiques et
s'emparer d'un diamant fabuleux. Parmi ses membres, Carl Mersen (Karlheinz Böhm), un rescapé de la guerre de Corée, Merigne (Michel Vitold), un spécialiste en électronique, accompagné à Tokyo par son épouse (Barbara Lass), et des complices japonais (un employé de la banque, sa sœur et un ancien compagnon d'armée de Mersen qui va disparaître rapidement).
Car le projet est contrarié par le boss de la mafia japonaise qui veut à
tout prix éviter qu'un vol spectaculaire dans une banque ne compromette
son "petit business" délictueux en tous genres sur lequel les autorités
locales ferment les yeux.
L'ambiance
du film est bizarre. Dans un Tokyo étrangement désertique, la
préparation du casse occupe plus des deux tiers du métrage. La plupart
des protagonistes, pendant cette période, est régulièrement suivie,
menacée, voire assassinée par un gang de japonais. Une intrigue
brièvement amoureuse naît et meurt entre Mersen et la femme de Merigne. Deray,
sans rien montrer, y développe une sensualité palpable. La femme est un
élément perturbateur et manipulé dans une organisation, malgré les
apparences, déjà passablement défaillante. Rififi à Tokyo est, sans aucun doute, assez proche d'un Mélodie en sous-sol ou d'un Touchez pas au grisbi,
avec lesquels il partage certains points communs : un dernier "coup"
avant la retraite, l'association de truands de générations différentes,
la maladresse, l'influence féminine et l'échec. L'absence de solidarité
entre les membres de l'équipe est également déterminant, à l'antithèse,
par exemple, du récent Ocean's Eleven.
Karlheinz Böhm, fils de son père***, acteur fassbinderien, étonnant dans le Peeping Tom de Michael Powell de 1960 et sortant du Four Horsemen of the Apocalypse de Minnelli, traîne une certaine langueur active troublante. Charles Vanel n'a pas le charisme de Jean Gabin(avec lequel il n'a tourné qu'un film) pour incarner un chef truand. La polonaise Barbara Lass****, remarquée dans le polonais Zezowate szczescie et l'italo-français Che gioia vivere de René Clément avec Alain Delon, trimbale sa blondeur nonchalante et Michel Vitold ne va pas au bout du potentiel de son personnage. Rififi à Tokyo est une œuvre, par certains aspects, attachante mais "en-deçà".
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*ancien truand, maître de l'argot reconverti dans la littérature, d'autres films sont inspirés de ses livres : Bob le flambeur de Melville, Le Clan des siciliens de Verneuil ou encore Razzia sur la Chnouf de Decoin.
*ancien truand, maître de l'argot reconverti dans la littérature, d'autres films sont inspirés de ses livres : Bob le flambeur de Melville, Le Clan des siciliens de Verneuil ou encore Razzia sur la Chnouf de Decoin.
**un probable hommage au fameux Du rififi chez les hommes de Jules Dassin dont Deray été l'assistant.
***le célèbre chef d'orchestre Karl Böhm.
****épouse de Polanski jusqu'en 1962, puis de son partenaire Karlheinz Böhm. Ils ont une fille qui est actrice de télévision, Katharina Böhm.
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