"You're asking me to save your life."
L'inspiration se niche parfois dans des lieux bien insolites. C'est en passant par une halle au poisson tokyoïte (celle célèbre de Tsukiji ?) qu'Isabel Coixet a en effet trouvé l'idée de son septième long métrage de fiction pour le cinéma. Premier film financé par son compatriote catalan Jaume Roures (co-producteur des trois derniers Woody Allen), Map of the Sounds of Tokyo est un drame romanesque, à la fois charmeur et intrigant. Moins percutant toutefois que ne l'étaient l'adaptation My Life Without Me et le précédent scénario original La Vida secreta de las palabras. Ce candidat à la "Palme" du 62e Festival de Cannes ne va pas non plus au bout de ses intention et ambition.
En plein singulier repas d'affaire, M. Nagara apprend par un appel téléphonique le suicide de sa fille. Effondré par ce décès qu'il impute de manière irrationnelle à David, le fiancé de Midori, le chef d'entreprise demande à son adjoint de l'assassiner. Ishida engage Ryu, jeune femme solitaire, tueuse occasionnelle et employée de nuit dans un des marchés au poisson de Tokyo. Munie d'une photographie de la victime, elle retrouve assez vite le Barcelonais installé au Japon, propriétaire d'une boutique de vins fins. Touchée par la généreuse gentillesse de David, Ruy accepte son invitation à dîner puis celle de l'accompagner dans la chambre d'un rabu hoteru où il avait l'habitude d'emmener Midori.
Un cinquième point de vue, ou plutôt d'écoute, celui du narrateur (preneur de son) s'immisce parfois illogiquement dans ce récit qui brouille volontiers les pistes initiales. Sans que l'on sache jamais si son témoignage justifie vraiment le choix du titre. Qu'elle le veuille ou non, Isabel Coixet ne porte qu'un regard exogène, distancié (touristique ?) sur Tokyo, les mœurs de ses habitants mais aussi sur l'histoire à plusieurs bandes qu'elle met en scène en négligeant certaines transitions. La cinéaste n'a pas non plus le talent d'un Wenders pour illustrer la mélancolie des errances urbaines ou celui d'un Wong Kar-wai en matière de sensualité érotique. Pourtant, de façon presque indéfinissable, Map of the Sounds of Tokyo ne laisse pas insensible. Est-ce cette étrange imbrication du malheur et du bonheur, des cultures, incarnées ici par Rinko Kikuchi (titulaire d'un second rôle remarqué dans Babel) et Sergi López, moins étrangères qu'il n'y paraitrait ? Ou les qualités visuelles (belle photographie du complice Jean-Claude Larrieu) et sonores (récompensées à Cannes par un "Prix Vulcain" de l'artiste-technicien décerné par la C.S.T*) ? Qu'importe (le flacon pourvu qu'on ait une douce ivresse) ! Le plaisir cinéphile n'est pas toujours rationnel.
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