"Don't you need sympathy, Sheila?"
Brièvement monté au "Booth Theatre" de Broadway en mai 1947*, Portrait in Black est porté à l'écran par Ross Hunter, surtout connu pour ses collaborations avec de Douglas Sirk, à partir de l'adaptation de ses auteurs Ivan Goff et Ben Roberts (co-scénaristes du percutant White Heat et promoteurs de populaires séries télévisées telles Mannix et Charlie's Angels). Réalisé par Michael Gordon, avec lequel Hunter vient de produire la comédie romantique Pillow Talk, cet insolite drame meurtrier explore obscurément un thème classique (celui de l'épouse traîtresse et de la complicité adultéro-criminelle), un terrain éclairé avant lui par quelques œuvres-phares, dont The Postman Always Rings Twice de Tay Garnett avec Lana Turner. L'interprète de Cora Smith, et plus récemment des rôles principaux de Peyton Place et Imitation of Life, y avait comme partenaire pour cette unique occasion un Anthony Quinn à peine remis de ses aventures polaires.
Du lit de sa chambre où sa maladie le cloue, Matthew S. Cabot dirige d'une poigne de fer, avec l'aide de son adjoint Howard Mason, la compagnie de marine marchande qui porte son nom. Il surveille également avec une brutale possessivité sa seconde épouse Sheila, la mère de leur jeune fils Peter. Bien informé, Matt Cabot a appris le probable départ de son médecin traitant, le dr David Rivera, pour un important hôpital zurichois ou la délivrance d'un permis de conduire provisoire à Sheila qui dispose pourtant d'une limousine et d'un chauffeur. Après avoir croisé sa belle-fille Catherine, celle-là se fait déposer devant un grand magasin, prétexte pour retrouver discrètement Rivera chez lui. Le chirurgien et son amante savent que, s'il apprenait leur liaison, Cabot serait susceptible de leur nuire gravement. L'idée de tuer son patient grâce à la seringue utilisée pour lui administrer chaque jour un sédatif est peu à peu devenue une véritable obsession pour Rivera. Le lendemain, au lieu de venir accompagné de son remplaçant, Rivera se présente seul au domicile des Cabot.
Projet annoncé au milieu des années 1940 et devant initialement réunir Joan Crawford et James Mason, Portrait in Black ne peut bien sûr rivaliser avec les films tirés des romans de James M. Cain, celui déjà cité, a fortiori l'excellent Double Indemnity de Billy Wilder. Si elle ne manque pas de "caractères", cette production tient du catalogue des erreurs à ne pas commettre en pareille périlleuse situation. Elle possède aussi les défauts de ses qualités, en particulier celui de diffuser son intrigue vers autant de multiples directions que de personnages secondaires, confiés en l'occurrence à de typés seconds rôles. Trop excentrique, trop tout court, Portrait in Black s'ancre dans une certaine dissipation que même le twist final ne parvient pas à contrarier.
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