"C'est déjà assez de ne pas voir, mais perdre ça... plutôt mourir."
Auteur de péplums à ses débuts, comme Sergio Leone, Ferdinando Baldi dispose en général d'une notoriété moins affirmée que celle de ses cadets et autres réalisateurs de westerns italiens, le Pasianien Damiani ou les Romains Sollima, Corbucci et Castellari. Après Rita nel West, pseudo "Trinita" chanté avec Terence Hill, le Salernitain enchaîne en tournant presque coup sur coup Texas, addio mettant en vedette Franco Nero, Preparati la bara! (authentique sixième des dix-huit volets de la série "Django" dans lequel le Vénitien Hill reprend le rôle tenu la première fois par le Parmesan Nero), puis Il pistolero dell'Ave Maria. Ces trois derniers, auxquels s'ajoute le présent film, restent sans doute les meilleurs de sa carrière. Co-écrit-produit et joué par le Ouest-Virginien Tony Anthony, interprète du personnage de 'l'Etranger' dans trois westerns de Luigi Vanzi(1), Blindman se singularise en transposant celui du masseur aveugle imaginé par Shimozawa et en offrant à l'ex-batteur des Beatles(2) un second rôle faussement acidulé(3).
Un cavalier arrive au galop dans une petite ville apparemment déserte où il semble longuement chercher un repère. Un individu malingre sort bientôt de chez lui à sa rencontre et lui indique l'endroit où trouver le 'Teigne', dans un logement situé face à l'église, découvrant à ce moment la cécité de son interlocuteur. Celui-ci tire alors à la carabine vers la cloche de l'édifice, la faisant résonner plusieurs fois. Réveillé par le bruit et les interpellations, le 'Teigne' apprend à 'Blindman' l'enlèvement, par un certain Domingo, des cinquante femmes venues d'Europe pour épouser les mineurs de Los Creek (Texas). Après avoir fait sauté le bâtiment à l'explosif, 'Blindman' prend la direction du Mexique. Grâce à l'information d'une prostituée, il se rend chez le père de Pilar peu avant que ne se présentent cinq hommes à cheval. Leur chef Candy, le frère de Domingo, vient rechercher contre son gré la blonde fille du paysan. Une fois celui-là parti, 'Blindman' abat son escorte qui tentait de se divertir à l'encontre du vieux gringo puis à la sienne. Mais sa tentative de faire valoir auprès de Domingo son droit contractuel sur les femmes, cédées par ce dernier à son ami général de l'armée mexicaine, à ses officiers et soldats, échoue ; il est jeté hors du fort sans ménagement.
Tout en étant, qu'on le veuille ou non, assez représentatif du western-spaghetti des années 1970, cette véritable curiosité filmique mérite à ce seul titre d'être (re)découverte. L'intrigue plutôt mince, la logique et la construction (réglées selon la formule axiomatique "cours après moi que je t'attrape") un peu absurdes du récit, la ponctuation pyrotechnique souvent inutile pourront soit dérouter, soit indisposer. Et s'il ne possède évidemment pas les fulgurantes qualités du Zatôichi de Kenji Misumi(4), Blindman n'en demeure pas moins attrayant en raison même de sa bizarrerie. Le faible relief accordé aux personnages tels que celui de Candy, interprété avec une jolie sobriété par Ringo Starr, de Dolce Mamma, de Pilar et, pourquoi pas, de l'une ou l'autre des Sabines, littéralement phagocytés par l'étrange héros-titre, constitue l'un des principaux regrets suscités par le film. Tony Anthony et Ferdinando Baldi collaboreront à nouveau à trois reprises, notamment dix ans plus tard à l'occasion d'une improbable suite-remake en 3D, Comin' at Ya!, où apparaît l'encore méconnue Victoria Abril à peine sortie d'une comédie pécassienne.
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1. le dernier déjà aux côtés de son compatriote Lloyd Battista.
2. à l'affiche la même année la délirante comédie fantastico-musicale 200 Motels du duo Tony Palmer–Frank Zappa.
3. inspiré par le titre de la comédie fantastique de Christian Marquand dans laquelle il tenait son premier rôle de pure fiction au cinéma ?
4. il faut d'ailleurs noter la curieuse ressemblance entre Shintarô Katsu et Tony Anthony.
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