Evoqué dans une conversation avec un ami, lui aussi amateur de wu xia pan, Da zui xia
était péremptoirement qualifié par celui-ci d'œuvre mineure. Autant
vous dire que notre amitié en a pris un coup. Car le quatrième film de King Hu
est, tout simplement, une des pièces essentielles du genre. Une de
celles qui l'a rénové, voire refondé. C'est d'autant plus troublant que,
même si King Hu
possède une connaissance des arts martiaux en tant que pratiquant et
acteur, il n'a, comme scénariste et réalisateur, pas d'expérience
consistante de la mise en scène d'un tel film. Pour couronner le tout,
il fait appel à une autre néophyte qui n'a pas vingt ans, Cheng Pei-pei, plus habituée aux mélodrames, pour incarner son personnage principale. Sorti la même année que le Bian cheng san xia du célèbre confrère de la Shaw Brothers, Chang Cheh, réalisateur auquel on compare souvent King Hu (voir bonus), Da zui xia lui est supérieur et a davantage marqué cette période du cinéma chinois. La meilleure preuve est que Chang Cheh réalisera, deux ans plus tard, une suite (moins convaincante) du film de King Hu en faisant appel à la même actrice. La version de L'Hirondelle d'or dont nous disposons aujourd'hui est celle qui a été présentée dans le cadre d'une rétrospective à Cannes en 2002.
Un groupe de brigands intercepte un convoi, dans lequel se trouve maître Chang,
le fils du gouverneur de la région, transférant deux prisonniers vers
une autre ville. Il demande que les détenus soient libérés et use de la
force pour parvenir à son objectif. Maître Chang devient
l'objet d'un marché proposé à son gouverneur de père : la mort ou
l'échange contre le chef des bandits, récemment capturé. Le gouverneur
ne se résout pas accepter cette offre et envoie un agent expert en arts
martiaux, Hirondelle d'or (Cheng Pei-pei)
pour le libérer. Celui-ci, qui passe pour un homme, est, en réalité, la
propre fille du gouverneur. Elle manie, en particulier, les poignards
avec une grande dextérité, ce qui lui sera bien utile dans son
affrontement contre les ravisseurs dirigés par le redoutable Tigre Face-de-jade (Chen Hung Lieh). Elle trouvera, pour accomplir sa mission, l'appui précieux d'un mendiant alcoolique, Chat ivre (Hua Yueh)...
apparence sous laquelle se cache un maître du kung fu qui a un compte à
régler avec un ancien condisciple, allié aux bandits.
Une
double intrigue simplissime, presque simpliste, mise en scène avec
talent. Avertissement préalable aux amateurs de films d'action
asiatiques modernes : le rythme de Da zui xia
n'a rien à voir avec la production actuelle. Pas de montage ébouriffant
grâce auquel on perd la majeure partie des images. Au contraire, les
combats sont captés par de longs plans-séquence qui leur donnent de la
fluidité et les phases d'observations, avant l'engagement physique, sont
soulignées, faisant un peu penser à celles qui précèdent les duels au
pistolet des westerns italiens. Une certaine théâtralisation est de
rigueur et la chorégraphie des combats, simple mais efficace, sèche et
même violente, laissant les câbles au rayon des accessoires, est proche,
esthétiquement, du ballet. Si vous avez aimé Wo hu cang long, je vous invite instamment à voir son inspirateur. La scène de l'auberge du film de Ang Lee est quasiment identique à celle de Da zui xia.
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