"- Vous êtes un animal.
- Non, pire. Humain."
"What are we doing on this galley, maaaaan ?"* C'est un peu la question que l'on pourrait poser à Andreï Konchalovsky. Le frère de Nikita Mikhalkov, l'ami de Tarkovski, après avoir réalisé le meilleur film de sa période soviétique, Sibirjada, passe aux Etats-Unis et tourne un film qui connaît, à juste titre, un certain succès, Maria's Lovers. Runaway Train lui succède, avec les mêmes producteurs mais dans un genre et un style bien différents.
Oscar Manheim dit Manny est un prisonnier, condamné pour vol, qui subit, de la part de Ranken,
le directeur de l'établissement de haute sécurité situé en Alaska, un
traitement particulièrement rude. Isolé, vivant dans l'obscurité, il a
développé une résistance physique et mentale et une haine à l'égard de
son geôlier extrêmement puissantes. Il est considéré comme une légende
vivante par tous les autres détenus pour son courage et sa ténacité. De
retour à des conditions normales de détention par décision juridique, il
parvient à s'évader, emmenant avec lui, contre son gré, un de ses plus
fervents admirateurs, le jeune Buck, le meilleur boxeur du
pénitencier. Ils embarquent dans un train dont le machiniste meurt d'une
crise cardiaque sans avoir réussit à le stopper. Se croyant tirés
d'affaire, les deux hommes sont bientôt rejoints par une jeune
aide-mécanicien, Sara, qui leur apprend la situation : le train
est lancé à pleine allure, sans conducteur et sans réelle possibilité
de l'arrêter. Bien sûr, Ranken est à la poursuite de ses prisonniers, bien décidé à ne pas laisser Manny réintégrer sa cellule.
A partir d'une histoire imaginée par Akira Kurosawa (que le réalisateur japonais devait d'ailleurs mettre en scène, empêché par des conditions météo défavorables), Konchalovsky et son scénariste Edward Bunker tissent une trame simple, presque simpliste, d'un double affrontement : celui qui opposent Manny et Ranken d'une part, Manny et Buck d'autre part. Le premier est primordial (primitif), entre deux individus d'une férocité animale (pire selon les propos de Manny),
règlement de compte entre le bras présumé d'une justice incarnée d'un
côté et la somme de toutes les haines développées chez celui que l'on a
réduit à l'état de bête sauvage de l'autre. Le second est plus subtil :
entre un homme qui ne rêve que de devenir le "partenaire"** de l'autre
et un être désormais totalement dépourvu de sentiments, qui
instrumentalise sa relation. Cela dit, l'impression globale est plutôt
mitigée.
Les allers-retours entre la scène de l'action et la salle de commande, sensés donner une dimension dramatique supplémentaire (vont-ils réussir à passer sur le pont ? Vont-ils entrer en collision avec le train arrivant en face ?...),
font penser aux plus triviaux des films catastrophes. Ajouter à cela un
dialogue qui veut faire absolument réaliste avec deux acteurs qui
forcent leur accent jusqu'à la caricature, un personnage féminin presque
invisible tellement il est pâle et des scènes de poursuite en
hélicoptère grotesques*** et vous obtenez un film pas franchement
passionnant. Il reste, néanmoins, que Jon Voight et John P. Ryan "font" des fauves impressionnants. On aurait bien voulu connaître le traitement qu'en aurait fait Kurosawa.
___
*l'expression usuelle serait "what a drag!" ponctué d'un "sh.t" sonore.
** il faut probablement considérer le terme également sous son acception sexuelle.
*** suspendu pendant de très longues minutes, au pire moment (passage de tunnels) et... par une température de -35° à l'abri !!
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